Qui sont les femmes sans enfants ?

Tout d’abord, il convient de préciser que ce paragraphe concerne un échantillon de 15 personnes et ne doit pas être tenu pour représentatif de toutes les femmes sans enfant. Il peut s’en dégager une tendance, mais qui doit être prise avec la plus grande réserve. Cette partie résume les généralités, les tendances globales, qui se dessinent dans une synthèse, mais ne fait pas état de chaque particularité ou exception, sauf si elle est précisée. En d’autres termes, on peut considérer qu’une femme sans enfants se « reconnaîtrait » plus facilement dans le « portrait robot » dont il est question dans ce paragraphe, que dans tout autre description de modèle familial.

Revenons au groupe de femmes que j’ai interrogées : toutes n’ont pas fait le choix délibéré de ne pas avoir d’enfant. Certaines n’en veulent pas, réellement (ou n’en voulaient pas – je parle au passé pour les plus de 45 ans), mais d’autres ne se sont pas posé la question dans ces termes. La vie a tout simplement « fait en sorte » (je cite) qu’elles ne deviennent pas mères.

Donc, soyons prudents face à ces femmes sans enfants, les raisons pour cela étant aussi personnelles les unes que les autres. Sans compter que parfois, elles ne répondent pas clairement. Il ne s’agit pas d’une volonté délibérée d’éluder les questions, mais plutôt d’une difficulté à faire le tri en elles, à clarifier leurs pensées, leurs émotions. Si elles semblent se perdre dans des paradoxes, des interrogations sans réponses ou des propos contradictoires, c’est que la question de la maternité est ballottée entre histoire personnelle et société, entre désir et non-désir, entre rendez-vous amoureux opportun et absence de rencontre, entre rationalisme et instinct.

Les femmes rencontrées étaient âgées de 28 à 60 ans. J’ai aussi interrogé deux femmes n’ayant pas voulu d’enfants, jusqu’au jour où…. Je voulais savoir comment ces femmes étaient passées d’un ferme projet de vie sans enfant, voir d’un non-désir d’enfant absolu, à une vie avec enfant. J’y reviens dans un autre article.

On peut dire qu’il y a une sorte « d’homogénéité » dans la population de ces femmes sans enfants. J’ai noté que dans l’ensemble, ces femmes sont plutôt de gauche et athées, et pour la seule femme qui est catholique croyante, elle n’est pas pratiquante.

Elles font partie de la classe moyenne (institutrice, infirmière, gérante d’une boutique, etc.). La plupart d’entre elles disent que si elles vivent sans enfant, c’est à la fois par choix personnel, mais aussi du fait des circonstances de la vie. Autrement dit, en dehors d’une minorité de femmes qui revendiquent réellement le choix profond et définitif de ne pas faire d’enfant, toutes les autres disent que si elles avaient rencontré l’homme « convenable », elles eurent peut-être eu un enfant. Elles admettent, d’un autre côté, que de nombreux hommes ne sont pas parfaits, mais sont des pères tout à fait “honorables”. Qui est donc l’homme « convenable » pour elles ? C’est un homme qu’elles imaginent comme père et papa[1] à la fois, avec lequel elles ont d’abord créé une relation solide et stimulante, basée sur la confiance et le respect mutuels, puis sur des ingrédients propres à chacune : entente intellectuelle, le plus souvent, mais également objectifs de vie similaires, activités communes, etc.

Or il se trouve que, sauf pour le couple que j’ai interrogé, les femmes dont j’ai recueilli le témoignage sont également célibataires. Elles ont parfois une relation de passage ou plus rarement une relation dans laquelle chacun vit chez soi. Donc, il est intéressant de voir que ces femmes sans enfants sont assez souvent sans attache amoureuse, et n’ont généralement jamais été mariées. Leur seule vie affective n’est pas un long fleuve tranquille. Cet aspect ne favorise pas la venue d’un enfant. Seule une des personnes interrogées a envisagé l’adoption en dehors de toute vie maritale.

Pourquoi, là encore, ne répondent-elles pas à la norme sociale ? Sont-elles trop exigeantes ? Ont-elles eu un modèle de couple parental trop déplorable ? Ont-elles peur de l’engagement ? Que s’est-il passé pour chacune d’elle ?

Les questions, posées autour de leur naissance et de leur enfance, apportent des réponses parfois tranchées et claires, parfois contradictoires ou floues.

En tant que conseillère conjugale, ce qui m’importait, étaient les différences d’un parcours à l’autre : en effet, il convient de ne pas mélanger les histoires, de ne rien projeter, d’éviter tout amalgame et confusion entre deux histoires, toujours dans l’objectif premier de garder une écoute personnalisée.

C’est ce qui permet d’entendre une femme qui souhaite une IVG, par exemple, alors qu‘elle a 35ans et n’a jamais eu d’enfant, ou une jeune femme de 18 ans se réjouir d’une grossesse qu’elle décide de mener à terme. C’est une écoute qui exige de faire abstraction non seulement des modèles induits par la société, mais également de son histoire personnelle.


[1] Le père, qui représente pour elle l’homme faisant preuve d’autorité, ne fuyant pas ce côté « ingrat » de la paternité, et le papa, l’homme qui donne de la tendresse et fait des câlins.

2 Commentaires (+ vous participez ?)

  1. Waiting Line
    Juin 09, 2012 @ 15:21:58

    Parmi les femmes sans enfant il y a aussi les femmes qui sont stériles. Pour celles-ci aussi la pression sociale est très présente, à porter en plus de la culpabilité – et bien souvent le sentiment de honte – qu’engendre le fait de ne pas se sentir capable d’avoir un enfant. Une sorte de double peine. Intéressant votre site.

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    • faire le choix de ne pas devenir mère
      Juin 10, 2012 @ 16:58:40

      Je suis d’accord, je reprécise juste que mon site est orienté vers les femmes qui font le choix de ne pas faire d’enfant (sujet de mon mémoire de conseillère conjugale et familiale) et non vers celles qui ne peuvent pas en avoir mais qui en voudraient bien. Dans notre société, il me semble qu’une femme stérile provoque la compassion « la pauvre, elle ne PEUT PAS » – mais…. elle ne faillit pas à son « devoir », sa « finalité » de femme de vouloir (devoir) procréer. S’il y a de la demande je pourrais toujours faire une partie concernant l’impossibilité de procréer (pour des raisons psychologiques, mécaniques ou autres). Merci pour votre commentaire.

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